Bien plus qu'une semaine !

Arrivant juste après les fêtes de Noël et de l’Epiphanie, la Semaine de prière pour l’Unité des Chrétiens risque de passer inaperçue. Située dans la longue période des vœux, elle peut apparaître comme une tradition qu’il convient plus ou moins de respecter.
 
            Cette démarche des Eglises chrétiennes n’est pas réservée à quelques spécialistes, elle n’est pas le fait de bonnes relations personnelles entre des responsables. Elle ne débute pas le 18 janvier pour se terminer  le 25 avec le sentiment du devoir accompli.
 
            Les pèlerins de Jérusalem éprouvent habituellement un réel malaise lorsqu’ils entrent dans la basilique du Saint Sépulcre. Ils sont légitimement choqués par les divisions visibles qui caractérisent l’exercice du culte en un lieu qui, par excellence, a vocation à manifester l’unique source de la foi chrétienne. Là, s’étale au jour une profonde blessure qui handicape l’Eglise et porte atteinte à sa mission et à sa crédibilité.
 
            Il n’est pas possible de réécrire l’histoire en quelques lignes et de dresser une liste exhaustive des causes des déchirures qui, au fil des siècles,  ont abîmé  l’Eglise Une de Jésus-Christ. Il serait toutefois dangereux de renvoyer à d’autres l’obligation de la remise en cause. Les Chrétiens ne peuvent pas davantage s’accommoder de situations dont les partenaires prendraient acte une fois pour toutes.
 
            Souvent, au début de leur pontificat, les papes récents ont affirmé leur volonté de franchir des pas décisifs sur le chemin de l’œcuménisme. Rattrapés par les problèmes internes à l’Eglise catholique, découvrant l’ampleur et la hauteur des obstacles à surmonter, ils ont perçu les limites que rencontrait leur intention.
 
            La bonne volonté de quelques-uns ne suffira pas à venir à bout de siècles d’incompréhensions, d’exclusions et de rejets. Elle ne réduira pas totalement les antagonismes politiques et culturels, les querelles de pouvoir qui ont souvent sous-tendu et provoqué les séparations. Les Chrétiens ne perdent pas courage. Il leur faut désirer ardemment l’unité et la demander à Celui qui en est la source et le garant.
 
            Il ne s’agit pas de rechercher l’unité pour reconstituer une force perdue, retrouver une crédibilité entamée ou résister ensemble à d’autres émergences religieuses considérées comme concurrentes. Nous voulons demander à Dieu de permettre à l’Eglise de remplir plus authentiquement la mission que son Fils lui a confiée.
 
            Avant sa mort et sa résurrection, Jésus prie pour l’unité. Sa prédication, ses contacts familiers, ses débats parfois houleux avec les responsables religieux, les tentations individualistes de ses apôtres ont largement mis en valeur la fragilité d’une Eglise dont il esquissait les premiers traits. Elle ne pourrait recevoir sa cohésion que dans la soumission totale de ses membres à l’œuvre de l’Esprit Saint. Nous en sommes toujours là !
 
            Nous le voyons, l’œcuménisme ne constitue pas une activité facultative et optionnelle de la vie et de la mission de l’Eglise. Les difficultés qu’il rencontre aujourd’hui ne seront pas résolues par des arrangements d’appareils ou des signes qui laisseraient faussement croire que les divisions sont surmontées.
 
            La prière et la réflexion toujours indispensables s’accompagnent nécessairement de la conversion, de la demande du pardon, du dialogue, du retour permanent au Christ qui vient à nous par sa Parole, les sacrements et la charité vécue. Nous croyons que des avancées entre les peuples, telle la construction de l’Europe, n’ont été possibles qu’en puisant leurs énergies dans la terre nourricière du Christianisme. On mesure facilement que cet apport serait encore plus fécond si l’Eglise pouvait manifester son unité. Le dialogue interreligieux prendrait une signification nouvelle.
 
            Aujourd’hui, il est possible d’agir, parfois de réagir ensemble. Ce qui nous rassemble est considérable même si l’unité plénière  n’est pas au rendez-vous. Pour laisser l’Esprit Saint emmener plus loin le Peuple de Dieu et l’humanité, les différentes Eglises chrétiennes, il convient de faire autant que possible, dans la lucidité et la vérité, tout ce qui peut être entrepris ensemble.
 
            Nous vivons dans l’action de grâce la semaine de prière pour l’unité des Chrétiens, mais l’aventure ne fait  que commencer. Il en va de notre responsabilité commune de la poursuivre. Nous serons alors fidèles au souhait exprimé par le Christ : « Que tous soit un ! [1]»
  
+ Jean-Paul JAEGER

[1] Jean 17, 21.

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