Dans cent jours
Lettre N°02 - Eglise d'Arras
Une centaine de jours environ nous séparent du premier tour de scrutin pour l'élection à la Présidence de la République. Nous rentrerons alors dans une longue période électorale qui durera jusqu'à la fin juin.
Depuis des mois, des années presque, il est question de ces échéances. Il est normal en démocratie que des opinions différentes s'expriment, y compris à l'intérieur d'un même parti. La multiplicité des candidatures n'a rien d'étonnant. Il serait surprenant qu'à l'intérieur d'une formation politique, un seul homme, une seule femme ait les aptitudes à exercer la magistrature suprême. Nous devons également nous réjouir quand le débat occupe la place publique et ne reste pas le monopole de quelques privilégiés.
En revanche, les êtres raisonnables que nous entendons rester ont le droit et le devoir de protester, de s'insurger quand la politique se fait spectacle, sombre dans la démagogie ou flatte tous les instincts. Non, tous les moyens ne sont pas bons pour courir après les voix. Quelques petites phrases distillées devant les caméras de télévision, mille déclarations opportunistes et successives ne constituent pas un programme!
En cette période, l'Église ne garde pas le silence. Sa parole peut gêner, interroger, bousculer. Pour cette raison, il ne manquera pas de bons apôtres pour rappeler le principe de laïcité ou proclamer que l'Église ne doit pas se mêler de politique. Sans doute, l'Église sortirait-elle de sa mission si elle choisissait et désignait son ou ses candidats. Elle faillirait si, par des consignes claires, elle cherchait à occuper l'espace politique à ses propres fins.
Nous devons affirmer de la même manière que si l'Église ne jouait pas sa partition, comme d'autres instances ou groupes, dans la symphonie politique, elle se déroberait à sa responsabilité. Dans les choix que feront des millions d'électeurs, leur foi est en jeu. Il est normal que les Catholiques et leurs pasteurs redisent en ces circonstances ce qui paraît essentiel dans la société d'aujourd'hui et de demain.
L'Église parle alors. avec une entière liberté. Elle ne revendique rien pour elle-même. Elle rappelle constamment le prix et la valeur de l'être humain, considéré comme personne et comme membre de multiples structures. Elle a l'audace d'affirmer qu'en aucune circonstance et pour aucune raison, l'homme, de sa conception à sa mort, ne peut être considéré comme un objet et assujetti à d'autres hommes. Il est enfant de Dieu, il est frère ou sœur de ses semblables, quels qu'ils soient. Il est lui-même et il ne peut cependant se construire et grandir que dans la reconnaissance de l'autre, différent.
Fidèles du Christ, nous savons combien dans l'histoire, cette image de l'homme a été blessée, exploitée, méprisée, anéantie, détruite. Elle l'est encore aujourd'hui, de façon barbare ou de manière insidieuse, par la guerre ou par la séduction, par la force ou par la loi.
A l'heure de choix décisifs, les Chrétiens engagés dans la vie quotidienne, les pasteurs qui ont mission de vigilance sont bien inspirés de scruter les programmes et d'interpeller les candidats sur leur propre vision de l'homme. Elle est toujours sous-jacente à des propositions d'ordre social, économique, éthique, international.
Sans prétendre être exhaustifs, les évêques ont apporté une contribution à ce débat capital. Le Conseil permanent de la Conférence des évêques de France a signé et diffusé un document intitulé: "Qu'as-tu fait de ton frère ?"
Ce premier travail est complété par un dossier plus directement destiné aux communautés chrétiennes. Il s'intitule: "Perspectives pour une société juste et fraternelle."
J'invite les fidèles de notre Église et tous ceux qui le voudront bien à se retrouver, dans les semaines qui viennent, autour de ces textes. Ils ne disent pas tout, mais peuvent constituer de bons éléments de départ pour réfléchir ensemble aux enjeux des consultations électorales qui s'annoncent. Il ne s'agit pas de désigner les bons et les mauvais candidats, mais de regarder, à la lumière de l'Evangile et de l'enseignement de l'Église, des programmes, des projets, des idées et d'en suggérer.
Ce travail peut se faire dans des groupes existants. Il peut être proposé à des volontaires qui, dans les paroisses ou ailleurs, voudront bien se retrouver à cette occasion. Nous ne devons pas avoir peur d'aborder avec des frères croyants ou des amis qui ne partagent pas notre foi des questions qui mettent grandement en cause les êtres humains dans notre société.
Tout sera perdu si nous tentons de transformer ces échanges en temps de propagande. Tout sera gagné si dans le dialogue, le partage et la découverte, chacun se sent plus éclairé et plus libre. Le secret de l'isoloir n'en servira que mieux l'homme!
+ Jean-Paul JAEGER
Depuis des mois, des années presque, il est question de ces échéances. Il est normal en démocratie que des opinions différentes s'expriment, y compris à l'intérieur d'un même parti. La multiplicité des candidatures n'a rien d'étonnant. Il serait surprenant qu'à l'intérieur d'une formation politique, un seul homme, une seule femme ait les aptitudes à exercer la magistrature suprême. Nous devons également nous réjouir quand le débat occupe la place publique et ne reste pas le monopole de quelques privilégiés.
En revanche, les êtres raisonnables que nous entendons rester ont le droit et le devoir de protester, de s'insurger quand la politique se fait spectacle, sombre dans la démagogie ou flatte tous les instincts. Non, tous les moyens ne sont pas bons pour courir après les voix. Quelques petites phrases distillées devant les caméras de télévision, mille déclarations opportunistes et successives ne constituent pas un programme!
En cette période, l'Église ne garde pas le silence. Sa parole peut gêner, interroger, bousculer. Pour cette raison, il ne manquera pas de bons apôtres pour rappeler le principe de laïcité ou proclamer que l'Église ne doit pas se mêler de politique. Sans doute, l'Église sortirait-elle de sa mission si elle choisissait et désignait son ou ses candidats. Elle faillirait si, par des consignes claires, elle cherchait à occuper l'espace politique à ses propres fins.
Nous devons affirmer de la même manière que si l'Église ne jouait pas sa partition, comme d'autres instances ou groupes, dans la symphonie politique, elle se déroberait à sa responsabilité. Dans les choix que feront des millions d'électeurs, leur foi est en jeu. Il est normal que les Catholiques et leurs pasteurs redisent en ces circonstances ce qui paraît essentiel dans la société d'aujourd'hui et de demain.
L'Église parle alors. avec une entière liberté. Elle ne revendique rien pour elle-même. Elle rappelle constamment le prix et la valeur de l'être humain, considéré comme personne et comme membre de multiples structures. Elle a l'audace d'affirmer qu'en aucune circonstance et pour aucune raison, l'homme, de sa conception à sa mort, ne peut être considéré comme un objet et assujetti à d'autres hommes. Il est enfant de Dieu, il est frère ou sœur de ses semblables, quels qu'ils soient. Il est lui-même et il ne peut cependant se construire et grandir que dans la reconnaissance de l'autre, différent.
Fidèles du Christ, nous savons combien dans l'histoire, cette image de l'homme a été blessée, exploitée, méprisée, anéantie, détruite. Elle l'est encore aujourd'hui, de façon barbare ou de manière insidieuse, par la guerre ou par la séduction, par la force ou par la loi.
A l'heure de choix décisifs, les Chrétiens engagés dans la vie quotidienne, les pasteurs qui ont mission de vigilance sont bien inspirés de scruter les programmes et d'interpeller les candidats sur leur propre vision de l'homme. Elle est toujours sous-jacente à des propositions d'ordre social, économique, éthique, international.
Sans prétendre être exhaustifs, les évêques ont apporté une contribution à ce débat capital. Le Conseil permanent de la Conférence des évêques de France a signé et diffusé un document intitulé: "Qu'as-tu fait de ton frère ?"
Ce premier travail est complété par un dossier plus directement destiné aux communautés chrétiennes. Il s'intitule: "Perspectives pour une société juste et fraternelle."
J'invite les fidèles de notre Église et tous ceux qui le voudront bien à se retrouver, dans les semaines qui viennent, autour de ces textes. Ils ne disent pas tout, mais peuvent constituer de bons éléments de départ pour réfléchir ensemble aux enjeux des consultations électorales qui s'annoncent. Il ne s'agit pas de désigner les bons et les mauvais candidats, mais de regarder, à la lumière de l'Evangile et de l'enseignement de l'Église, des programmes, des projets, des idées et d'en suggérer.
Ce travail peut se faire dans des groupes existants. Il peut être proposé à des volontaires qui, dans les paroisses ou ailleurs, voudront bien se retrouver à cette occasion. Nous ne devons pas avoir peur d'aborder avec des frères croyants ou des amis qui ne partagent pas notre foi des questions qui mettent grandement en cause les êtres humains dans notre société.
Tout sera perdu si nous tentons de transformer ces échanges en temps de propagande. Tout sera gagné si dans le dialogue, le partage et la découverte, chacun se sent plus éclairé et plus libre. Le secret de l'isoloir n'en servira que mieux l'homme!
+ Jean-Paul JAEGER