LA MISÉRICORDE VIENT A NOUS.
Lettre Mgr Jaeger Eglise d'Arras 21
Le 8 décembre dernier, le Pape François a solennellement ouvert la Porte sainte de la Basilique Saint Pierre de Rome. Par ce geste, débutait le Jubilé extraordinaire de la Miséricorde. À l’invitation du Saint Père, comme tous les évêques résidentiels du monde, j’ai reproduit le même geste dans la Cathédrale d’Arras, le dimanche 13 décembre.
Jusqu’au dimanche 20 novembre 2016, les fidèles seront invités à se rendre en pèlerinage dans les lieux jubilaires. Ils y prieront. Ils écouteront la Parole de Dieu. Ils participeront aux diverses célébrations. Ils bénéficieront des fruits du Sacrement de la Réconciliation et de la Pénitence. Les membres du Peuple de Dieu se disposeront à accueillir la Miséricorde de Dieu et à en faire l’expérience. Ils repartiront, le cœur et le regard purifiés. Ils redécouvriront sur les routes quotidiennes leurs frères humains, eux-mêmes destinataires de la tendresse et de la Miséricorde Dieu. Ils seront alors invités à travailler plus ardemment à l’instauration ou la restauration de relations humaines plus conformes au projet universel d’Amour de Dieu pour l’humanité.
Dans nos familles, dans nos comportements individuels et collectifs, dans nos échanges économiques, sociaux, commerciaux se pose quotidiennement la question du sens de l’être humain et de sa dignité. Les évolutions techniques et l’envahissement des technologies bouleversent la compréhension et les pratiques qui concernent la personne humaine. La stratégie politique, les conflits armés, les mouvements de population, les nécessités climatiques relèguent trop souvent au second plan l’homme créé à l’image de Dieu, perçu comme un objet, un gêneur, un usurpateur, un ennemi. Que dire du terrorisme aveugle qui ne craint pas la sauvagerie pour imposer une idéologie ou une hégémonie ?
Le terme et la réalité de la Miséricorde ne font guère partie de notre vocabulaire courant et de nos préoccupations habituelles. En cette fin d’année 2015, il n’est pas difficile d’en reconnaître, même confusément, la nécessité. En un petit document, d’une extraordinaire richesse intitulé Le visage de la Miséricorde[1], le Pape François nous en fait emprunter la route. Reprenant une expression de Saint Thomas d’Aquin, le Pape redit que la « Miséricorde est le propre de Dieu dont la toute-puissance consiste justement à faire miséricorde.[2] »
En entrant dans les paraboles de la brebis perdue, de la pièce égarée, du retour du fils prodigue, nous sommes appelés à nous laisser saisir nous-mêmes par l’infinie miséricorde de Dieu. Oui, elle nous est offerte abondamment et gratuitement. « La miséricorde de Dieu est sa responsabilité envers nous. Il se sent responsable, c’est-à-dire qu’il veut notre bien et nous voir heureux, remplis de joie et de paix. [3] »
Si telle est la bonté de Dieu envers chaque personne, il va de soi que l’Église ne peut être qu’un signe et un instrument de la Miséricorde de Dieu. Quand nous guette le risque de la gestion, de l’organisation, du pouvoir, de l’autoritarisme, de la domination, il nous est bon d’entendre réaffirmée l’authentique mission que le Seigneur confie à son Église : « La Miséricorde est le pilier qui soutient la vie de l’Église. Dans son action pastorale, tout devrait être enveloppé de la tendresse par laquelle on s’adresse aux croyants. Dans son annonce et dans le témoignage qu’elle donne face au monde, rien ne peut être privé de miséricorde. La crédibilité de l’Église passe par le chemin de l’amour miséricordieux et de compassion. [4]»
Dans quelques jours, nous nous inclinerons devant l’enfant nouveau-né de la crèche de Bethléem. Notre foi nous fait reconnaître en lui, Dieu fait homme. Les bergers ont accueilli l’annonce de sa venue. Humble et caché, il renonce à la puissance qui constitue l’attribue majeur de tout dieu normalement constitué ! Même dans notre pays sa seule vue dérange l’espace public !
C’est bien le Dieu de Miséricorde qui déjà s’offre en Jésus. Une immense espérance nous envahit. La faiblesse, l’échec, la blessure, le péché n’enferment pas définitivement l’être humain. Un avenir est ouvert par cet enfant divin. Il incarne la Miséricorde du Père pour tous ses enfants. Par lui, l’amour peut encore et toujours enflammer le cœur de l’homme !
Beau, Saint et Miséricordieux Noël !
+ Jean-Paul JAEGER