Quarante jours : Un programme !

desert desert  Durant le temps du carême, l’Église appelle ses membres à méditer le livre de l’Exode. Dieu y fait sortir le peuple qu’Il a choisi de la terre d’esclavage pour le conduire vers la Terre Promise, séjour de justice, de paix et d’amour où, selon la Parole de l’Écriture, « ruissellent le lait et le miel.  »

 

Nous sommes invités à revivre l’expérience humaine et spirituelle de la libération. Des causes sociales, économiques, politiques, historiques expliquent les haines, les guerres, les rejets, les dominations, les exclusions, les passions. Elles doivent être analysées, dénoncées et corrigées. La responsabilité et la liberté, toujours à conquérir, sont également en cause. Nous devons bien admettre que nous sommes prompts à abdiquer notre liberté, notre responsabilité pour nous laisser enchaîner par les forces qui, en nous et autour de nous blessent, avilissent et détruisent. Là est aussi notre péché tant personnel que collectif.

 

Le Seigneur nous entraîne dans ce long Exode, itinéraire de vérité, de dépouillement, mais chemin d’amour qui mène au renouvellement et de nos vies individuelles et collectives, de nos communautés.

 

Ainsi est fixé pour nous le premier objectif de notre carême : abandonner les chemins de l’orgueil, de la puissance, de la supériorité et dans l’humilité, la pauvreté, le dénuement du cœur, reprendre ensemble le simple aveu : « Oui, je connais mon péché, ma faute est toujours devant moi. Contre toi et toi seul j’ai péché, ce qui est mal à tes yeux, je l’ai fait.   »

 

Pour notre bonheur, l’aridité du désert ne constitue pas le dernier pas et le mot ultime de l’humanité. Avant même que nous ne confessions notre péché, l’Amour de Dieu s’offre à nous. Le prophète proclame : « Revenez au Seigneur votre Dieu, car il est tendre et miséricordieux, lent à la colère et plein d’amour, renonçant au châtiment.  » Dans des existences humaines souvent troublées, inquiètes, désespérées, Dieu ouvre les voies de l’espérance. En son Fils Jésus, Il nous réconcilie avec Lui et entre nous.

 

Dans une société marquée par la communication, la technique, l’efficacité, le marketing, il ne sera jamais logique de faire l’aumône dans le secret, de prier dans le secret, de jeûner dans le secret ! Nous flattons volontiers ce qui se voit, s’entend, se manifeste. Un investissement doit être rentable et nous en escomptons souvent un bénéfice immédiat et substantiel. Le carême réhabilite en nous la modestie, le silence, l’investissement à fond perdu : curieuses valeurs dont le Christ proclame qu’elles permettent de gagner la vie.

 

Vous l’avez compris, en pratiquant le partage, notamment dans la campagne annuelle du Comité Catholique contre la Faim et pour le Développement, nous ne posons pas simplement quelques gestes en faveur de membres de la famille humaine particulièrement démunis, nous retrouvons notre propre identité. Nous ne serons jamais nous-mêmes sans cette relation d’Amour à Dieu et à nos frères. Et ces frères, nous ne les choisissons pas !

 

Le temps du carême 2007 sera traversé par une campagne électorale. Nous aurons à faire des choix, à nous engager. Pour de multiples raisons, nous éprouverons peut-être la tentation de nous désintéresser de cette consultation ou de n’en retenir que le scintillement des paillettes ! N’est-elle pas pour nous une occasion de promouvoir, au nom même de notre foi, des modes de vie fondés sur la reconnaissance de l’amour et de la vie qui nous font voir l’homme avec le regard de Dieu ?

 

Le Fils de Dieu ne nous a pas sauvés de loin. Il s’est mêlé à notre histoire et a déposé en elle les prémices de la vie nouvelle. A l’exemple du Christ nous ne pouvons pas regarder à distance ce qui se passe et se décide sur notre planète et dans notre pays. Le jugement, la critique et la condamnation ne suffisent pas. Témoins de la Parole de Dieu, de son Amour qui pardonne, sauve et donne la vie, nous voulons recevoir et poser dans notre humanité les premiers signes de la terre nouvelle dont disparaîtront le deuil et les larmes.

 

« Qu’as-tu fait de ton frère ?  » La question empruntée au livre de la Genèse est posée à tous les Français qui s’apprêtent à élire un président, une présidente de la République et des députés. La réponse ne s’enferme vraisemblablement pas dans un seul programme, une seule candidature. Elle mérite cependant que nous la répercutions et que nous assumions, pour notre part, les responsabilités qui nous incombent dans ce vaste champ de la politique.

 

Il n’y aura pas trop de quarante jours !

 

 

 

 

 

 

                                                                      + Jean-Paul JAEGER



  Exode 3, 8.

  Psaume 50, 5 et 6

  Joël 2, 13.

  Genèse 4, 10.