La vie est belle !

Lettre dans Eglise d'Arras n°9-2010

CEF-Lourdes2009 CEF-Lourdes2009   

Depuis deux ans, à l’occasion de leurs deux assemblées annuelles, les Evêques de France déploient une longue et patiente réflexion qui se résume en ces termes : « Demain, la vie de nos communautés chrétiennes. »

 

Au risque de décevoir les attentes qui s’expriment à travers toute l’Eglise en France, le Cardinal André Vingt-Trois définit, à la fois, l’ampleur et la modestie du projet : « Nous ne cherchons pas à élaborer un plan national de réforme. Nous voulons plutôt nous soutenir les uns les autres pour mener à bien le travail dans chacun de nos diocèses, dans leurs particularités et leurs diversités. »

Nous constatons, de fait, que le rêve d’une stratégie globale, universellement admise et mise en œuvre, est illusoire. Les mutations ne sont possibles qu’en empruntant un long chemin qui se trace à mesure que l’on avance.

 

Les remises en question sont acceptées lorsque les circonstances les imposent et les rendent inéluctables. Les anticipations nécessaires se heurtent trop souvent à la pesanteur des habitudes. Pendant des décennies, des repères ont orienté, vaille que vaille, les éclipses de la foi et de ses pratiques dans l’existence de nombreux catholiques français. La peur de les voir disparaître les paralysent. Elles les empêchent de porter un regard lucide et serein sur une réalité mouvante et d’affronter un avenir qui s’invite déjà dans nos communautés.

 

Pourtant, selon ce que précise le Président de la Conférence des Evêques de France : « Les signes de la présence chrétienne dans la société s’estompent, la transmission vers les plus jeunes générations paraît fragile ; nous ne voyons pas bien comment les communautés chrétiennes assumeront d’ici quelques années les charges de leur animation. La baisse du nombre des prêtres rend de plus en plus aléatoire la possibilité de tenir un dispositif ancien, tel que nous l’avons connu. »

 

Ce constat n’a pas brisé l’élan des membres du Peuple de Dieu. Il l’a orienté autrement. Plus que jamais, l’engagement à la suite du Christ demande conviction et audace. Il met en jeu la liberté. Il doit affronter les vents contraires. Il ne peut plus beaucoup compter sur l’encadrement social forgé naguère à l’école du christianisme. Le fidèle du Christ ne peut qu’aller à la rencontre de l’humanité avec pour seule force l’amour du Seigneur. L’accueil n’est pas systématiquement garanti !

 

Pourtant des hommes et des femmes, des jeunes répondent à l’appel et rendent témoignage au Christ mort et ressuscité. Ils partagent avec d’autres sa Vie. Ils organisent la catéchèse, la prière, rassemblent des groupes d’échange et de partage. Ils regardent les préoccupations humaines à la lumière de l’Evangile. Ils servent les malades, les prisonniers, les étrangers, les isolés, les rejetés.

Certains sont associés plus étroitement à la charge pastorale des prêtres. D’autres s’investissent dans la préparation au baptême, au mariage. Ils accompagnent les familles en deuil. Ils se retrouvent dans des équipes d’animation liturgique. Ils retrouvent des frères dans de nombreux mouvements. Ils constituent des cellules de prière.

 

Beaucoup ont été étonnés de la réponse positive accordée pour constituer des Maisons d’Evangile ou participer en famille à « Dimanche, Parole en fête », à « Graine de Parole. » Que dire des ouvriers de l’ombre qui apportent une collaboration épisodique, mais tellement indispensable ?

 

La fermeture de communautés religieuses nous attriste. Le rayonnement de ces hommes et de ces femmes qui ont tout donné pour suivre le Christ obéissant, pauvre et chaste demeure au milieu de nous un signe d‘espérance et une forte invitation à ne pas baisser les bras.

L’essor du diaconat nous dit qu’aujourd’hui le Christ est encore là, au milieu de nous, pour servir jusqu’à l’extrême et donner sa vie par amour.

 

Nos communautés chrétiennes ont besoin des prêtres. A la manière des apôtres, ils sont totalement donnés et libres pour présider au nom du Christ qui est la tête de son Eglise. Ils annoncent l’Evangile et veillent à sa proclamation. Ils communiquent la vie de Dieu. Ils sont garants de l’unité et de la charité.

 

Notre Eglise connaît et connaîtra encore de profonds bouleversements. Nos communautés sont plus petites. Elles ne se résignent pas. « L’Eglise retrouve le goût d’être apostolique et missionnaire. Elle est apostolique parce que, depuis vingt siècles, nous revenons à la foi au Christ par le témoignage des apôtres et de leurs successeurs : ‘ As-tu quelque chose sans l’avoir reçu ? ‘ (1ère Corinthiens 4, 7). L’Eglise est missionnaire parce qu’elle ne serait rien si elle n’était pas animée par l’esprit de Pentecôte. »

 

Cette vitalité nous pousse à répondre sans réserve, avec un enthousiasme renouvelé à la sollicitation du Christ qui résonnera à nouveau pour nous le 10 octobre 2010 : «Faites des disciples ! »
 


+ Jean-Paul Jaeger