Dur Réveil !

Église d'Arras n°14

57791597Depuis bien longtemps la trêve estivale constitue l’une des caractéristiques de notre culture française. Elle correspond à cet engourdissement qui, pendant des semaines,  fait tourner la France au ralenti pour ne mobiliser que les seules énergies du tourisme et des loisirs.

 

            Nous vérifions chaque année le peu de réceptivité que rencontrent dans la population de notre pays les événements, quelle qu’en soit la gravité, qui se déroulent à la surface de la terre pendant les mois de juillet et d’août. La France est en vacances !

 

            En cet été 2014, nous avons, cependant, été contraints d’ouvrir l’œil en cet habituel temps de somnolence. Des catastrophes aériennes, le conflit en Israël et les Palestiniens de la bande de Gaza, les accrochages entre la Russie et l’Ukraine, l’élimination de minorités, notamment chrétiennes,  dans des régions de l’Irak ont eu raison de nos aspirations au calme et au repos.

 

            Il faut ajouter à ce concert de drames la persistance des combats en Syrie et en certains pays d’Afrique. Comment ne pas mentionner aussi, malgré toutes les mesures dissuasives mises en place, le fort accroissement autour de Calais, du flux de candidats au passage en Angleterre. Non, moins que jamais, il n’a été possible d’échapper aux interrogations et aux rudesses de l’histoire à l’heure où beaucoup rêvent habituellement d’évasion.

 

            Les cyclistes du Tour de France, les athlètes et les nageurs de nos équipes nationales nous ont, certes, montré qu’il était toujours possible de dépasser des limites, de vaincre et de gagner ensemble. Ce sursaut de confiance et d’espérance ne parvient pas à dissimuler l’urgence de nos choix et nos décisions en faveur de l’homme.

 

            Il n’y a pas d’heure et de jours fixés pour s’engager contre toutes les formes du fanatisme, de l’aveuglement et de la fureur. Il faut sans doute de la volonté, du courage et de l’audace pour les freiner, les arrêter et les éradiquer. Dans le même temps, il convient de développer la rencontre, le dialogue, la coopération.

 

            Nous découvrons avec horreur qu’il est possible que des jeunes issus de chez nous se mettent au service de forces et de puissances qui forment le projet d’anéantir des cultures qu’elles diabolisent. L’indignation ne peut être notre seule  réaction. Les bastions et les forteresses ne viendront pas à bout de cette rancœur.

 

            Les mouvements qui ont troublé notre été nous appellent à de sérieuses remises en question. Il est urgent de réapprendre à vivre ensemble. Une communauté nationale, des peuples ne grandiront jamais en fixant le plus petit dénominateur commun qui leur permettra de vivre sans trop de dommages les uns à côtés des autres.

 

            Bon gré mal gré, le mécanisme des relations entre les personnes, les groupes, les nations et les états nous invitent non seulement à l’élimination des points de friction possibles, mais à la recherche et à la promotion du bien commun. Cet enrichissement ne s’accommodera jamais de la seule satisfaction et de l’addition de tous les droits individuels. Il passe par des renoncements consentis et partagés.

 

            Certains observateurs ont cru pouvoir tirer de propos du pape François qu’en certains cas, il était licite de faire appel à l’intervention armée pour faire face à l’agression. L’Eglise n’a jamais totalement exclu cette hypothèse. Ce serait bien mal connaître l’enseignement de l’Eglise et le témoignage de notre pape que de ne retenir que cet ultime recours pour résoudre des difficultés bien réelles.

 

            Le langage des armes exprime toujours un échec de l’humanité. Au seuil d’une nouvelle période d’activité qui aura pour toile de fond les commémorations de batailles meurtrières de la grande guerre, il n’est pas superflu de nous en souvenir.

 

            Nous nous sommes probablement sentis à plusieurs reprises bien démunis au cours des mois de juillet et août 2014. Rompant eux-mêmes le silence auquel les fidèles de notre Eglise aspirent comme tant d’autres en cette période, les évêques de France ont invité à la prière. Ils savent bien qu’elle ne dédouane personne de ses responsabilités. Ils veulent redire que dans le Christ mort et ressuscité jaillit la source de l’humanité renouvelée.

 

            Nos communautés sont invitées à s’y abreuver et à en indiquer le chemin à leurs frères et sœurs. Qui doute encore qu’il y a urgence à le faire à l’aube du parcours 2014-2015 ?

 

Bonne rentrée !

 

+ Jean-Paul JAEGER