Seul au monde

recevoir, s'ouvrir pour se laisser pénétrer.

edvard munch edvard munch  Il y a bien des façons de se sentir seul au monde. Ainsi quand on est au fond du gouffre, ou face à un mur, ou dans une impasse. En vrai, ou en image. Les expressions ne manquent pas. On peut se sentir très seul au milieu d'une foule, quand on ne connaît personne, quand personne ne nous tend la main–et pourquoi le ferait-elle ?

On peut être seul à deux, face à l'autre, quand l'autre est un étranger, un vrai mystère. Ou dans un couple, quand ça se déchire, quand le conjoint semble disparaître. Quand en vrai il disparaît.

 

Et on peut être seul face à soi même. Ça c'est le pire.

Mais pour ma part je n'y crois pas. Je ne crois pas qu'on puisse réellement être seul – ou alors c'est la mort. La mort certaine.

Quand trop de tourments me guettent, ou déjà m'envahissent, et que perseul_au_monde seul_au_monde  sonne n'est là pour me venir en aide, j'essaie de vite, vite, en sortir. Sortir de moi-même. Réellement ouvrir la porte, aller au grand air. Ou en image, laisser s'en aller mes idées, mes pensées.

Ou au contraire me recroqueviller, me refermer comme une huître, aller chercher des solutions au fond moi. Là où il n'y a plus rien, ni souvenirs, ni projets, aucun langage.

Parce que je sais que là je trouve quelqu'un qui m'attend.

Aller au fond de soi-même, cela peut-être catastrophique si c'est pour n'y trouver personne. On est alors plus seul qu'avant. Ou on reste égoïste. On tourne en rond.

Par contre, il peut se passer des choses extraordinaires si c'est pour y rencontrer un autre être vivant, que l'on connaît très bien alors qu'il ne s'est jamais montré, il ne s'est jamais exprimé.

misericorde-de-dieu-300x212 misericorde-de-dieu-300x212  On peut comparer la prière à un homme qui prend l'habitude, souvent, d'abandonner ce qu'il est en train de faire, les amis, les ennemis, pour aller rendre visite, en secret, à quelqu'un. Il pourrait être son père. Il est tout de suite prêt à l'accueillir, à tout moment, de jour comme de nuit. Il lui offre aussitôt ce dont il a besoin, comme on offre l'hospitalité à un invité. Tous les jours, toutes les nuits, chaque fois que cet homme a besoin d'un réconfort, d'un conseil, d'un temps de repos - quand il est fatigué de lui-même, par exemple.

 

J'ai parfois l'impression d'être heureux, au fond de moi, alors qu'il n'y a aucune raison, au contraire tout porte au désespoir.

C'est parce qu'un autre que moi prend les commandes à ma plcolombe colombe  ace. Moi je suis en mode pilotage automatique. C'est lui qui décide, lui qui ressent les choses.

Je suis au moins deux personnes – parmi bien d'autres. Il y a celle qui travaille, parle, s'extasie ou prend peur... et puis il y a celle qui est là tapie, invisible. Celle-là ne bouge pas, elle n'a qu'une fonction : recevoir, s'ouvrir pour se laisser pénétrer.

 

Au fond elle n'est qu'amour.

 

 

 

Jérôme van Langermeersch