Acte de contrition

Mon Dieu, j'ai un très grand regret de vous avoir offensé, parce que vous êtes infiniment bon et que le péché vous déplaît. Je prends la ferme résolution, avec le secours de votre sainte grâce, de ne plus vous offenser et de faire pénitence »

acte de contrition acte de contrition  C'est un peu le trou noir. Le vague à l'âme. Cette jolie expression pour dire qu'en fait tout va mal en ce moment. En espérant que ça ne va pas trop durer.

En cette fin d'après-midi d'hiver, alors que la nuit se fait dense très tôt – c'est l'hiver – mes pensées virevoltent sans pouvoir se poser. J'ai peur de l'avenir, des souvenirs blessants me reviennent, Dieu sait pourquoi.

J'essaie de me raisonner : il n'y a pas vraiment de raison, en ce moment, d'angoisser. C'est seulement qu'il faut attendre. Attendre que passe le vent mauvais.

Mais rien n'y fait. Il y a des moments dans la vie où même la raison ne peut l'emporter sur les sentiments.

Alors, à quoi faire appel ?

Au silence, peut-être. Le silence des sentiments. Les faire taire. Mais même cela est quelquefois très difficile. On a l'impression d'être submergé, sans pouvoir faire surface. Sans pouvoir faire face.

 

Et ce soir-là bizarrement, sans crier gare, me sont revenus des morceaux d'une prière que j'avais apprise au catéchisme, j'avais peut-être 6 ans :

« Le péché te déplaît, Seigneur ; tu n'aimes pas le péché ».

C'est très étrange, je n'avais plus dit ces mots jusqu'à cet instant-là.

Il m'a fallu quelque temps pour me rappeler d'où ils venaient : l'acte de contrition.

«

 

J'ai été immédiatement apaisé, seulement en me rappelant que notre Seigneur n'aime pas quand nous l'offensons. Je n'avais même pas besoin du petit texte entier.

Et pourtant je n'avais pas fait de péché, me semble-t-il !

Ce n'est pas parce qu'on est triste sans raison qu'on fait une faute.

 

Alors j'ai compris cette prière autrement : notre Seigneur n'aime pas quand nous le fuyons, quand nous oublions de l'appeler à l'aide.

Quand j'étais petit j'apprenais trois sortes de péchés : par pensée, par action, et par omission. Longtemps je me suis demandé comment on pouvait pécher par omission. Déjà je trouvais ce mot un peu compliqué. Et personne ne m'avait expliqué en quoi le fait d'oublier (en principe c'est involontaire) peut constituer une faute.

 

Ce soir-là, la semaine dernière, j'ai compris.

Il m'a donc fallu presque 60 ans. Mieux vaut tard que jamais.

 

Oublier c'est parfois l'inverse, un acte généreux. C'est à la base du pardon : tout est pardonné, parce que tout est oublié.

C'est aussi une nécessité, pour ne pas trop se morfondre, ne pas regretter tout le temps. Ne pas ressasser.

Mais oublier de se tourner vers Dieu quand il n'attend que ça, là c'est grave.

 

Cet acte de contrition, on n'y pense plus beaucoup. Il paraît un peu désuet.

Peut-être parce qu'il est trop violent, aussi. Il appelle à la violence – contre soi-même. Et la suite est terrible : « je prends la ferme résolution... ». Il faut un courage incroyable, surtout pour un enfant.

Il faut se sentir très fort.

Et c'est cette force qui m'animait ce jour – et encore aujourd'hui.

Heureusement je ne suis pas seul dans cette lutte contre l'angoisse.

J'ai le secours de sa sainte grâce.

Encore une jolie formule.

Elle rappelle que l'acte de contrition est mêlé aux deux autres : l'acte de foi, et celui d'espérance.

Je me sens capable de ne plus pécher – et c'est insensé.

Sauf si j'ai confiance en celui contre qui j'ai péché.

Et la foi est folie, tout le monde sait ça.

Jérôme van Langermeersch, le 20/01/2019